DWZ catalogue 3 BD - Flipbook - Page 38
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Alexandre Séon
(Chazelles-sur-Lyon, 1855 – Paris, 1917)
F
ils d’un commerçant-drapier de la région
lyonnaise, Alexandre Séon, très tôt attiré
par le dessin, reçoit les premiers conseils d’un
peintre d’enseigne de son voisinage qui lui
apprend le nom des couleurs. Se destinant à
une vocation artistique, il s’installe à Paris et
intègre en 1878 l’atelier d’Henri Lehmann à
l’École des Beaux-Arts, où il se lie d’amitié avec
Aman-Jean, Alphonse Osbert, Ernest Laurent
et Georges Seurat. Élève appliqué et sensible,
il fait ses débuts au Salon en 1879, et rencontre
l’année suivante Pierre Puvis de Chavannes, dont
il devient très vite l’un des principaux collaborateurs et le plus fervent disciple. Il participe ainsi
à l’exécution de plusieurs grandes décorations
murales, notamment au Panthéon, à l’Hôtel de
Ville de Paris et à la Sorbonne, assimilant auprès
de son maître la clarté synthétique des compositions et le sens du monumental. C’est ainsi
qu’il obtient la commande du décor de la salle
des mariages de la mairie de Courbevoie réalisé
entre 1885 et 1889. Présentés à l’Exposition universelle peu avant leur installation dé昀椀nitive, ces
décors valent à Séon une médaille d’argent ainsi
qu’un certain succès critique. Habitué du Salon
des artistes français, et exposant occasionnel
aux Indépendants depuis 1888, le jeune artiste
est encouragé par Puvis à rejoindre la Société
Nationale des Beaux-Arts dès 1890. Dans les
années qui suivent, profondément in昀氀uencé par
le Symbolisme alors en plein essor, Alexandre
Séon développe un style plus épuré et intérieur
et participe à partir de 1892 aux expositions des
Peintres Impressionnistes et Symbolistes à la
galerie Le Barc de Boutteville. Collaborant étroitement avec José-Maria de Heredia, Jean Lorrain
et Joséphin Péladan, il devient l’un des artistes
majeurs du Salon de la Rose+Croix, auquel il
prend part sans discontinuer entre 1892 et 1897.
Très impliqué dans le mouvement, il réalise les
emblèmes de la Rose+croix et les frontispices
des œuvres de Péladan. Son art se caractérise
dès lors par une pureté linéaire héritée du préraphaélisme, une palette réduite ainsi qu’une
iconographie marquée par un certain idéal féminin, empreint de mysticisme et de quête d’absolu.
À
la lisière du visible et du songe, notre
saisissant pastel illustre avec une rare
économie de moyens les recherches spirituelles
d’Alexandre Séon. Probablement présentée en
1893 au Salon de la Rose+Croix et à la Société
Nationale des Beaux-Arts, la composition se
concentre par un cadrage resserré sur le pur
pro昀椀l d’une jeune femme assoupie sur un oreiller blanc. Livrées à une lumière diffuse, les carnations roses aux re昀氀ets nacrés de son visage
contrastent avec ses longs cheveux roussâtres.
Le fond, rapidement brossé en hachures obliques
de gris bleuté et partiellement estompé, suggère
moins un espace réel qu’une atmosphère. Les
épaules dénudées, le bras droit étendu le long
du corps ainsi que le téton rose à l’extrémité
gauche de la feuille viennent apporter de subtiles
touches plus sensuelles à cette scène spiritualisée et silencieuse, qui invite plus au recueillement
qu’elle ne suscite le désir. En supposant par les
yeux clos de son modèle l’évanouissement de la
conscience propre au sommeil, Alexandre Séon
s’inscrit dans l’un des thèmes de prédilection du
Symbolisme, et nous invite à emprunter avec lui
la voie privilégiée de la contemplation et du rêve.