DWZ catalogue 3 BD - Flipbook - Page 60
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Honoré Auclair Gleizes
(Capoulet, Ariège, 1855 – Courbevoie, 1920)
N
é en 1855 en Ariège, au cœur du Midi
pyrénéen, Honoré Gleizes se rend très
jeune à Paris a昀椀n d’y mener une carrière artistique. Installé à Courbevoie avec sa famille, il y
fréquente les ateliers de peinture et développe
rapidement une activité de portraitiste et de paysagiste en adoptant un style proche de l’impressionnisme encore naissant. À l’exception d’une
participation au Salon des Indépendants de 1895,
il se tient dans un premier temps à l’écart des
salons parisiens. Il joue surtout un rôle éminent
d’enseignant informel auprès de son neveu Albert
Gleizes, l’initiant dès l’enfance à la pratique du
dessin et à la peinture en plein air le long des rives
de la Seine à Neuilly, exerçant ainsi une in昀氀uence
décisive sur son développement artistique. En
1903, il expose au Salon des Indépendants un
important ensemble de huit paysages, dont certains titres atmosphériques, « Après l’orage »
(cat. n° 968), « Derniers rayons » (cat. n° 970),
« Effet de matin » (cat. n° 971), témoignent de ses
préoccupations impressionnistes. Il renouvelle
l’expérience l’année suivante au même salon
avec six nouvelles toiles dans le même esprit,
s’attachant à saisir en pleine nature les aspects
changeant de la lumière. En 1911, lorsque les
premières expositions cubistes déclenchent
l’ire du public, Albert Gleize se réfugie un temps
auprès de son oncle Honoré à Courbevoie. Cela
coïncide avec le choix étrange que fait ce dernier de prendre le pseudonyme d’Auclair, sous
lequel il expose au Salon des Indépendants entre
1911 et 1913. Bien qu’il n’ait jamais obtenu une
reconnaissance publique comparable à celle de
son neveu, Honoré partage parfois les cimaises
avec les jeunes avant-gardistes, notamment en
présentant trois paysages au Salon de la Section
d’Or, célèbre exposition organisée en octobre 1912
à la galerie La Boétie par le groupe de Puteaux,
concurremment au Salon d’Automne.
P
einte en 1901, 昀椀gurant Le Mont Valérien
vu des hauteurs de Courbevoie dans
un audacieux cadrage vertical, l’huile sur toile
que nous présentons appartient à la période de
maturité d’Honoré Gleizes. Dès la 昀椀n du XIXème
siècle, ce dernier développe une peinture de paysage sensible et 昀椀nement structurée, en marge
des grandes avant-gardes mais avec une 昀椀nesse
toute personnelle. Observées depuis une position
légèrement en surplomb, probablement depuis
les hauteurs du quartier où l’artiste résidait,
quelques maisons de Courbevoie jouxtent le jardin du premier plan, alors qu’au fond apparaît la
silhouette du Mont Valérien noyé dans une brume
bleuissante, posé à l’horizon comme l’ombre
mythique du Vésuve. Le paysage est baigné d’une
lumière atmosphérique laiteuse, habilement
saisie dans le re昀氀et d’un ciel zébré de rose et de
jaune pâle. Sous cette lumière suspendue, très
probablement matinale, les volumes géométriques des maisons et les masses vertes de la
végétation se fondent dans une harmonie douce,
sans rupture de ton. Pointilliste par endroits, la
touche est rapidement posée, davantage dans
la recherche d’un équilibre poétique que proprement technique. A l’instar d’un Pissarro ou
d’un Lebasque, Honoré Gleizes nous offre de
contempler un paysage familier et intime, 昀椀dèlement retranscrit par la facture papillonnante
de son pinceau. Silencieux, apaisé et suggestif, il
propose une halte et invite au recueillement, à la
veille des bouleversements du siècle.