DWZ catalogue BD - Flipbook - Page 62
Maurice Biais
(Corbeil, 1872 – Gorbio, 1926)
F
ils d’un riche notaire de Corbeil, élevé dans
un milieu privilégié et cultivé, Maurice
Biais est un artiste de la Belle époque aux multiples talents, tour à tour graphiste, af昀椀chiste,
illustrateur et designer de meubles, de verres
et de céramiques. D’abord inspiré par Jules
Chéret et l’esthétique art nouveau, il sut rapidement s’en démarquer pour créer son style
propre. Enfant terrible de Montmartre, il forme
avec sa compagne Jane Avril, l’une des plus
célèbres danseuses du Moulin Rouge avec qui
il a eu un 昀椀ls en 1897 et qu’il 昀椀nit par épouser
en 1911, l’un des couples les plus actifs de la vie
nocturne de la butte. Joueur endetté, incurable
buveur et fumeur invétéré, en rupture de ban
avec sa famille, il parvient néanmoins à mettre
ses qualités de décorateur au service des plus
grandes boutiques parisiennes. Employé un
temps à la maison de l’Art nouveau inaugurée
par Siegfried Bing en 1895, pour laquelle il réalise
d’importantes peintures murales, Maurice Biais
rejoint ensuite dès 1899 son principal concurrent,
la non moins célèbre Maison Moderne de Julius
Meier-Graefe. Ce dernier, après avoir fréquenté la
communauté artistique d’avant-garde de Berlin,
où il avait contribué à la création de l’in昀氀uent
magazine Pan, avait ouvert en 1898 son propre
magasin à Paris dédié aux arts décoratifs, proposant aux clients d’aménager leurs intérieurs
en réunissant des sculptures, poteries, verres,
lampes et bijoux. Outre Van de Velde, qui expose
ses créations, Meier-Graefe fait appel à certains
jeunes af昀椀chistes comme Manuel Orazi pour faire
sa publicité. En 1902, Maurice Biais réalise pour
la boutique une af昀椀che sur laquelle on peut voir
une élégante cliente, dont la présentation de dos
invite le spectateur à regarder avec elle un encrier
et une lampe dessinés par Maurice Dufrène, des
petites sculptures en bronze de George Minne,
un chat en porcelaine de la manufacture danoise
Bing & Grøndahl, ou encore, au second plan, un
fauteuil d’Abel Landry (昀椀g. 1). Si Biais s’adonne
également à l’illustration, contribuant à des
périodiques comme Le Journal pour tous, des
ouvrages pour la jeunesse, l’édition de partitions
musicales ou de cartes postales, ce sont avant
tout ses af昀椀ches qui assoient sa notoriété, aussi
bien en France qu’à l’étranger. En 1901, il expose
ainsi chez Williams à New York, avant de présenter ses lithographies au Salon des Artistes
Français de 1903 (cat. n° 3794 et 3795). Engagé
sur le front en 1914, il est décoré de la croix de
guerre mais revient profondément marqué et
blessé par les gaz de combat. Parti se soigner
dans le sud de la France au début de l’année
1926, il décède le 8 avril au sanatorium de Gorbio,
bordé par Jane Avril.
D
e format vertical, l’écran de cheminée que
nous présentons appartient à la période
la plus féconde et moderne de Maurice Biais.
L’artiste a superposé en les cousant deux compositions brodées et peintes sur toile aux sujets
assez similaires. Figurant de jeunes élégantes
dans des jardins, alternant les seuls noirs et
blancs, leurs traitements synthétiques évoquent
déjà les premières réalisations de Bernard Boutet
de Monvel. La typologie des signatures apposées dans les deux cas en bas à droite, écrites
en toutes lettres et encerclées, rattache l’objet à
l’année 1902, et suppose ainsi qu’il ait pu compter parmi les pièces exposées dans la Maison
Moderne de Meier-Graefe.
Fig. 1 :
Maurice Biais [impr. J. Minot],
La Maison Moderne, 1902,
Lithographie (114 x 78,5 cm),
Paris, musée de la publicité
(Inv.-Nr. : 14550).